Grâce aux progrès des traitements des maladies chroniques et des cancers, de plus en plus de malades peuvent poursuivre ou reprendre leur travail – avec toutes les questions que cela soulève. Une première session de conférences d’experts vise à faire le point sur les évolutions récentes en matière de diagnostic et de prise en charge thérapeutique des pathologies chroniques. Après le rappel des enjeux de l’intégration des personnes souffrant de maladies chroniques dans le milieu du travail, un focus sera fait sur trois grandes catégories de maladies : les rhumatismes inflammatoires, le diabète et les maladies cardiovasculaires. La prise en charge des rhumatismes inflammatoires a été révolutionnée par les biothérapies, et les capteurs de glycémie permettent à des diabétiques de garder leur poste de travail, ce qui n’était auparavant pas toujours possible en raison du risque d’hypoglycémie.
La deuxième session de conférence d’experts est consacrée aux cancers, qui ont eux aussi bénéficié de progrès thérapeutiques majeurs au cours des dernières années. « Les traitements actuels permettent souvent le retour au travail, avec des durées d’arrêt de travail plus courtes, voire pas d’arrêt du tout pour certains cancers du sein », souligne la Pr Maria Gonzalez (Strasbourg), qui a coordonné cette thématique du congrès avec le Pr Christophe Paris (Rennes) et la Dr Anne Delépine (Paris). Mais « les médecins du travail doivent mieux connaître les effets secondaires des nouveaux traitements », ajoute-t-elle.
Prévention de la désinsertion professionnelle
Sujet important lié à cette évolution des traitements, la prévention de la désinsertion professionnelle. Les premières données issues de la réflexion menée dans le cadre de la prochaine recommandation de la Haute Autorité de santé sur ce problème seront présentées. « La durée de l’arrêt de travail a un impact majeur sur le risque de désinsertion, et il faut agir de façon précoce afin d’éviter une rupture totale avec le monde du travail, estime la Pr Gonzalez. Sur le plan psychologique, il est important de pouvoir retrouver son activité. La dépression réactionnelle, notamment, peut être minorée par la reprise du travail. »
Deux sessions de communications orales seront l’occasion de partager les actions concrètes de prévention qui ont pu être réalisées : celle, nationale, menée par l’Institut national du cancer (INCa), l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) et l’Association nationale des DRH (ANDRH), qui a permis d’élaborer une charte spécifique pour le maintien ou le retour au travail des patients ayant un cancer ou une maladie chronique évolutive, ou les expériences menées chez des personnes souffrant de sclérose en plaques ou d’épilepsie.
« L’impact professionnel des maladies chroniques sur les aidants, qui sont confrontés à une lourde charge et ont un risque élevé d’absentéisme, n’est pas oublié, précise la Pr Gonzalez. Le médecin du travail peut être sollicité pour un aménagement de poste dans ce contexte. »
En pratique, le regard sur les maladies chroniques reste encore très péjoratif, et les travailleurs sont souvent confrontés à un vrai dilemme : ils craignent que l’annonce de leur maladie ne nuise à leur carrière. « Il est pourtant conseillé d’en parler au médecin du travail afin de pouvoir bénéficier d’un aménagement de poste », insiste la Pr Maria Gonzalez.
« Et, de façon plus globale, les relations entre les médecins de soins et du travail concourent aussi au maintien en emploi des patients atteints de maladies chroniques ou de cancer, estime la Dr Delépine. D’une part parce que les premiers peuvent éventuellement adapter leur traitement en fonction des contraintes du poste de travail, et d’autre part pour que les discours médicaux soient cohérents et qu’ainsi le patient-salarié ne se sente pas perdu. »
Entretien avec la Pr Maria Gonzalez (Strasbourg) et la Dr Anne Delépine (Paris)
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