L’émergence des zoonoses, comme les infections par le virus Ebola ou le virus H5N1, pose la question de la protection des travailleurs et des soignants, et, globalement, « nous avons du mal à capitaliser les expériences acquises lors de crises antérieures », note le Pr Jean-François Gehanno, professeur de médecine du travail au CHU de Rouen.
Un autre problème récurrent en santé au travail est l’insuffisance de la vaccination de la population et des travailleurs de santé. « On assiste dans le milieu des soins à une situation paradoxale, poursuit le Pr Gehanno. Des vaccins modérément utiles comme celui contre le tétanos sont parfaitement acceptés, alors que d’autres pourtant très utiles, comme ceux contre l’hépatite B ou la rougeole, font l’objet d’une forte défiance. Le taux de vaccination contre la grippe du personnel soignant est estimé entre 15 et 20 %, un chiffre très faible au regard des bénéfices du vaccin sur la réduction des épisodes grippaux, voire l’absentéisme. »
Les soignants parmi les plus exposés
Pour la rougeole, extrêmement contagieuse, les soignants sont à la fois victimes et vecteurs de la maladie : leur risque d’être contaminés est multiplié par 18 par rapport à la population générale. L’objectif d’une couverture vaccinale de 95 %, nécessaire pour stopper la circulation virale, est loin d’être atteint.
À côté de la vaccination, les précautions d’hygiène standard sont indispensables : hygiène des mains, utilisation de solutions hydroalcooliques et port raisonné des gants sont d’un bon rapport coût-efficacité.
Les médecins sont une population à risque vis-à-vis des maladies infectieuses, et le port de masque dans certaines circonstances permet d’éviter la contamination. Les masques chirurgicaux offrent une bonne protection contre les infections transmises par de grosses gouttelettes, ce qui est le cas du méningocoque, du virus grippal ou de Bordetella pertussis. En revanche pour des pathologies transmises par des petites particules qui restent en suspension dans l’air (varicelle, rougeole, tuberculose), il faut faire appel à des masques de protection respiratoire qui adhèrent au visage. L’INRS met à disposition une affiche sur le type de masque à porter (1).
Des recommandations pour le CMV
La prévention de l’infection à cytomégalovirus (CMV) est une question importante chez les femmes enceintes ou en âge de procréer, puisqu’elle est la première cause d’infection congénitale et de surdité non héréditaire. Les femmes travaillant dans le milieu de la petite enfance sont particulièrement exposées : la transmission du virus se fait principalement par contacts étroits avec les liquides biologiques de personnes excrétant le virus, au premier rang desquelles enfants de moins de 3 ans.
« La sérologie est difficilement utilisable, source d’inquiétude, parfois d’interruption de grossesse injustifiée. Le Haut Conseil de la santé publique s’est récemment penché sur la question, et devrait publier très prochainement ses recommandations, notamment sur le dépistage de l’infection à CMV », indique le Pr Gehanno.
Entretien avec le Pr Jean-François Gehanno (Rouen)
(1) www.inrs.fr/media.html?refINRS=A%20763
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