Praticien et patron : stimulant mais usant

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Publié le 19/04/2024
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La fonction de chef de service ou de pôle n’est vraiment pas une sinécure. Récit de quelques managers très impliqués.

Diriger une ou plusieurs grosses entités n’est pas forcément plus difficile que d’être à la tête d’une seule unité

Diriger une ou plusieurs grosses entités n’est pas forcément plus difficile que d’être à la tête d’une seule unité
Crédit photo : S.T.

Le Dr Olivier Quéré, vice-président de la CME, pneumologue et chef du pôle de médecine à l’hôpital de Guingamp, est formel : « personne ne se bat jamais pour le poste de chef de pôle ». Chef de service est plus populaire, mais à peine. Dans les deux cas, la charge mentale, le temps de travail, la pression et les responsabilités en rebutent plus d’un. Sans compter l’impact sur la vie privée.

La fonction de médecin manager n’est pas pour autant homogène d’un hôpital à un autre. Certes nombreuses, les difficultés administratives varient en fonction de la taille de l’établissement. Ainsi, les équipes médicales sont moins fournies dans les petits établissements, mais le circuit de décision sera plus court. C’est exactement l’inverse dans des grands établissements comme l’AP-HP qui, pour fluidifier les décisions, va privilégier des réunions en petit comité (un médecin et un cadre) sur des sujets précis ou des formats rapides en position debout.

Dans le contexte fragile de pénurie médicale, les médecins avec de fortes personnalités ne sont pas toujours faciles à gérer, d’autant qu’ils dépendent hiérarchiquement du centre national de gestion (CNG). Selon le Pr Olivier Clément, chef de pôle et chef de service de l’imagerie à l’Hôpital européen Georges-Pompidou (HEGP, Paris), « il peut exister des problèmes de communication entre les chefs de service. Avec les départements et les pôles, cela a créé une couche de plus qui a donné l’impression aux chefs de ne pas être entendus. »

L’une des difficultés du médecin manager est également de devoir composer avec la direction, dont le soutien est essentiel pour mener à bien des projets structurels parfois coûteux. Car à de rares exceptions près, le carnet de chèques reste entre les mains du directeur d’hôpital.

Il faut savoir déléguer et faire preuve d’exemplarité

Pr Philippe Juvin, HEGP

Quelles sont les qualités requises pour être un bon médecin manager ? Selon le Pr Philippe Juvin, chef de service des urgences de l’HEGP, il faut s’entourer d’assistants qui « sont meilleurs que soi, savoir leur déléguer et faire preuve d’exemplarité ». Ce médecin-député a toujours cherché à « donner envie de grandir » à ses adjoints.

GHT, la solution ?

Contre toute attente, diriger une ou plusieurs grosses entités n’est pas forcément plus difficile que d’être à la tête d’une seule unité. Cohérence dans le projet médical et communication transversale sont la clé. Le Dr Jean-Christophe Lecomte est radiologue au groupe hospitalier Saintes-Angely, coordonnateur médical du groupement de coopération sanitaire d’imagerie de Saintonge et chef de quatre services de radiologie sur un demi-département. La logique intrinsèque à toutes ces missions de management lui évite la saturation. « Ce qu’on voit derrière ce système, c’est la mise en œuvre concrète de ce que doivent être les groupements hospitaliers de territoire (GHT) pour éviter que les hôpitaux se fassent concurrence », se réjouit-il. Ce management médical multisite existe dans le bassin de vie du sud de la Charente Maritime depuis 2021. Prochaine étape : faire de même à l’échelon paramédical. Une mission qui s’annonce ardue.


Source : Le Quotidien du Médecin