Une allergie liée au climat

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Publié le 26/05/2023
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Le syndrome allergie pollens-aliments se rencontre de plus en plus fréquemment. En cause, le changement climatique mais aussi la pollution, qui ont multiplié les nuisances des pollens. Des mesures de prévention sont plus que jamais nécessaires.
La pollution augmente la biodisponibilité des allergènes

La pollution augmente la biodisponibilité des allergènes
Crédit photo : VOISIN/PHANIE

En Europe du Nord, les pollens de Bétulacées, la famille des bouleaux, sont les premiers en cause dans le syndrome allergie pollens-aliments (Sapa), dont la prévalence augmente. Il touche aujourd’hui près de la moitié des enfants souffrant de rhinite allergique aux bétulacées ou aux graminées.

Ce syndrome est principalement médié par des PR10 (pathogenesis-related proteins de type 10). Ces protéines de stress sont largement présentes dans le règne végétal, que ce soit dans les pollens ou dans la majorité des aliments. Généralement, les symptômes sont déclenchés par la consommation de végétaux crus. Toutefois, la thermolabilité de certains allergènes P10 n’est pas constante (notamment le soja, le céleri, la noisette et la carotte), ce qui rend la prise en charge plus délicate.

Facteurs d’anaphylaxie mal identifiés

Le Sapa médié par les PR10 est souvent bénin, mais des cas de réaction systémique voire d’anaphylaxie sont de plus en plus souvent décrits ; ils concerneraient de 1 à 10 % des Sapa, toutes causes confondues. Les facteurs de risque ne sont pas toujours clairement identifiés. Les premiers cas retrouvés dans la littérature s’expliquaient par la présence d’un cofacteur : inhibiteurs de la pompe à protons, effort, prise sous forme liquide, à jeun, alcool… Ils sont désormais absents dans près de 50 % des cas.

Quelques facteurs de risque ont été identifiés chez l’enfant : la dermatite atopique, l’urticaire chronique, un nombre élevé d’aliments responsables de Sapa, mais l’anaphylaxie est fréquemment inaugurale (93 % des cas, dans le réseau d’allergovigilance). Il n’est pas possible d’identifier clairement un phénotype clinicobiologique permettant de définir des enfants à risque.

Plus forte production pollinique

Or, la pollinisation du bouleau est grandement affectée par le réchauffement climatique. L’exposition au dioxyde de carbone (CO2) est également associée à l’augmentation de la masse et du diamètre du chaton, et par conséquent à une plus forte production de pollens chez des arbres de plus en plus jeunes. La dégradation du pollen au contact des polluants engendre aussi une fragmentation de ses grains, augmentant la biodisponibilité des allergènes, en raison d’une meilleure pénétration dans le tractus respiratoire.

ITO à la pomme à l’étude

Certaines mesures environnementales pourraient être mises en place, pour une prévention primaire de la sensibilisation au pollen de bouleau (végétation des zones urbaines avec des espèces d’arbres moins allergisantes, diminution de relargage de microparticules par le trafic routier…).

L’intérêt d’une immunothérapie sublinguale en prévention de la survenue d’un Sapa chez les patients ayant une rhinite allergique n’a pas été étudié, et son efficacité dans le traitement est controversée.

Accessible et facilement réalisable, l’induction de tolérance orale à la pomme semble être un traitement de choix pour des patients motivés. Son efficacité est appuyée par plusieurs études ayant montré une augmentation du seuil de tolérance de la pomme, mais aussi des autres fruits contenant des PR10, ainsi qu’une amélioration des symptômes de conjonctivite allergique printanière (1).

Exergue : Une prévention primaire peut être mise en place

Communication des Dr Gabrielle Wintrebert et Jean-François Fontaine (CHU de Reims) 

(1) Nothegger B et al. Immun Inflamm Dis 2021;9:503-11

Dr Christine Fallet

Source : Le Quotidien du médecin